Souveraineté 2.0 : Laâgab pris dans les filets du contrôle d'Internet - Radio M

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Souveraineté 2.0 : Laâgab pris dans les filets du contrôle d’Internet

Radio M | 20/02/24 16:02

Souveraineté 2.0 : Laâgab pris dans les filets du contrôle d’Internet

Comment bâtir une industrie high-tech moderne avec un internet bridé, dans un pays où les libertés numériques sont bafouées et où plane la menace permanente de la censure ? C’est la question cruciale que pose la feuille de route ambitieuse en matière de souveraineté numérique définie par le gouvernement algérien.

Certes, le ministre de la Communication, Mohamed Laâgab a raison de placer l’indépendance technologique au cœur des priorités nationales. Comme il l’a souligné, “la souveraineté numérique est désormais en tête de l’agenda de l’Etat algérien, ce qui est positif et honorable”. Mais Laâgab reconnaît aussi que sa concrétisation “exige la conjugaison des efforts de tous”, étant “un processus rude et coûteux”. Or, l’atteinte de cet objectif stratégique se heurte à la réalité d’un écosystème numérique verrouillé, où les voix dissidentes sont réduites au silence.

Car développer une expertise technologique de pointe nécessite un terreau de libre circulation des idées et des informations. Or, en Algérie, l’internet est strictement encadré, la blogosphère est dans le collimateur du pouvoir et le moindre écart à la ligne officielle est susceptible d’entraîner la censure.

Difficile dès lors d’attirer les meilleurs talents ou de susciter l’innovation dans un climat aussi étouffant. Toute velléité de souveraineté numérique se heurte à l’autoritarisme d’un appareil d’État prompt à verrouiller l’espace public numérique.

En parallèle de ce verrouillage technologique, le pouvoir algérien a récemment durci son arsenal juridique pour museler les voix dissidentes sur internet et les réseaux sociaux. La nouvelle loi sur la presse adoptée en décembre 2022 renforce considérablement la censure et la surveillance en ligne. Les peines pour les délits d’opinion ont été alourdies, avec des amendes exponentielles et des emprisonnements pouvant aller jusqu’à 5 ans.  

Au final, le paradoxe algérien est frappant : comment prétendre construire une souveraineté technologique dans un pays où la liberté d’expression est bafouée et le débat d’idées étouffé ? Les ambitions affichées en matière d’émancipation numérique sonnent creux tant que les autorités continueront à verrouiller internet et à sanctionner les voix dissidentes.