Répression renforcée en Algérie : un nouveau Code pénal taille les libertés à la hache - Radio M

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Répression renforcée en Algérie : un nouveau Code pénal taille les libertés à la hache

Radio M | 06/05/24 13:05

Répression renforcée en Algérie : un nouveau Code pénal taille les libertés à la hache

L’Algérie a récemment apporté des modifications majeures à son système juridique dans le domaine sécuritaire. Une série d’amendements au Code pénal ont été promulgués au Journal officiel, renforçant de manière significative les mesures répressives susceptibles de restreindre les libertés individuelles et publiques des citoyens. Présentées comme visant à protéger la stabilité du pays, ces modifications draconniennes taillent à la hache de nombreux droits fondamentaux.

Parmi les mesures les plus inquiétantes, la criminalisation très large de la “divulgation d’informations secrètes” liées à la défense ou à l’économie nationale via les réseaux sociaux. Quiconque sera reconnu coupable de cette infraction au profit d’un “État étranger” sera reconnu comme “traître” et risquera désormais la réclusion criminelle à perpétuité, une peine d’une sévérité rarement égalée. Mais même sans intentionnalité avérée de nuire, les peines pourront atteindre 30 ans de prison.

Le nouveau texte introduit également une définition extrêmement floue de ce qui est considéré comme un “acte terroriste ou subversif”. Ainsi, tout acte visant à “affaiblir le moral” des forces armées et de sécurité, y compris en temps de paix, pourra être durement réprimé sur cette base fourre-tout. Une mesure emblématique du musellement des contre-pouvoirs et des critiques envers les institutions répressives de l’État.

La réforme durcit aussi la protection des symboles de la “révolution de libération”, dont la dénigration ou l’insulte sera désormais passible de lourdes peines pouvant aller jusqu’à 5 ans de prison ferme. Une énième atteinte à la liberté d’expression déjà très limitée en Algérie.

Mais ce nouveau Code pénal cible également les autorités locales en criminalisant toute “immixtion” dans les affaires judiciaires. D’un côté, elle est présentée officiellement comme une mesure visant à garantir l’indépendance de la justice, en empêchant toute ingérence politique des responsables élus locaux (walis, maires, etc.) dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire. À la surface, cela peut sembler être une avancée vers une séparation plus nette des pouvoirs.

Cependant, cette disposition comporte un revers beaucoup plus préoccupant. En effet, en menaçant ces élus locaux de lourdes peines de prison (de 5 à 10 ans) en cas d’“immixtion”présumée dans les affaires judiciaires, elle peut en réalité servir à réprimer toute forme de désobéissance ou d’opposition de leur part aux directives et décisions prises par le pouvoir central.

L’arbitraire sécuritaire semble aussi se renforcer avec l’introduction de peines très lourdes, jusqu’à 10 ans de prison, pour toute agression physique contre un agent des forces de l’ordre ou un juge dans l’exercice de leurs fonctions.

Seule mesure a priori positive, le nouveau Code pénal introduit le recours aux travaux d’intérêt général et au bracelet électronique pour certains condamnés. Mais leur application restrictive en réduit considérablement la portée.

Au final, ces réformes apparaissent comme un nouveau tour de vis sécuritaire visant à réprimer sévèrement toute contestation citoyenne, au mépris des libertés fondamentales. Une dérive autoritaire qui confirme le rejet par le régime algérien des revendications d’ouverture démocratique, pourtant encore vives dans la société civile.