Mary Lawlor : “L’article 95 bis va à l’encontre de la déclaration de l’ONU sur les droits de l’homme” - Radio M

Radio M

Mary Lawlor : “L’article 95 bis va à l’encontre de la déclaration de l’ONU sur les droits de l’homme”

Radio M | 05/12/23 16:12

Mary Lawlor : “L’article 95 bis va à l’encontre de la déclaration de l’ONU sur les droits de l’homme”

Mary Lawlor, rapporteuse spéciale de l’ONU chargée de la situation des défenseurs et des droits humains a tenu ce mardi 05 décembre une conférence de presse au siège Nations Unies à Alger. Durant cette conférence, la rapporteuse onusienne a déclaré que l’article 95 bis du code pénal est en contradiction directe avec les principes énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus. 

D’après l’article 13 de la déclaration, cité par Lawlor lors de la conférence de presse : “Toute personne a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de solliciter, de recevoir et d’utiliser des ressources dans le but exprès de promouvoir et de protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales par des moyens pacifiques, conformément à l’article 3 de la présente Déclaration ». 

La rapporteuse spéciale a souligné que le problème inhérent de l’article 95 Bis réside dans son ambiguïté qui permet aux autorités de l’utiliser de manière arbitraire. Cette disposition empêche les défenseurs des droits de l’homme d’accéder à des ressources nécessaires à leur noble cause. Cette disposition exacerbe l’isolement des organisations algériennes de défense des droits humains, et entrave leur capacité à agir efficacement.

Rappelons que l’article 95 bis a été introduit en 2020 dans le contexte du Hirak. Plusieurs analystes voient cet article, ainsi que l’article 87 bis comme des outils judiciaires qui servent à la répression du mouvement populaire et de l’opposition. L’article sanctionne d’« un emprisonnement de cinq à sept ans et d’une amende de 500 000 DA à 700 000 DA, quiconque reçoit des fonds, un don ou un avantage, par quelque moyen que ce soit, d’un Etat, d’une institution ou tout autre organisme public ou privé ou de toute personne morale ou physique, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, de commettre ou d’inciter à commettre des actes susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’État, à la stabilité et au fonctionnement normal de ses institutions, à l’unité nationale, l’intégrité territoriale, les intérêts fondamentaux de l’Algérie ou encore la sécurité et l’ordre publics.”

Marry Lawlor a exhorté les autorités à reconsidérer et à modifier cette disposition restrictive. 

Elle a par ailleurs souligné que le 95 bis n’allait pas seulement contre les principes onusiens mais qu’il a suscité également de grandes inquiétudes auprès des militants des droits de l’homme quant à d’éventuelles poursuites judicaires suites à une interprétation abusive de ce qui consiste une « atteinte à la sécurité de l’État ». Plusieurs militants et journalistes ont été poursuivi et condamné sous la coupe du 95 bis depuis 2020, y compris le journaliste Ihsane El Kadi, qui purge une sentence de 7 ans de prison dont 5 ans ferme à la prison d’El Harrach.