Les coulisses du procès du général Ali Ghediri - Radio M

Radio M

Les coulisses du procès du général Ali Ghediri

La Rédaction | 28/01/22 17:01

Les coulisses du procès du général Ali Ghediri

Hier soir, le jury du tribunal correctionnel de la Cour d’Alger a sévèrement condamné le général à la retraite et ancien candidat à la présidentielle avortée d’avril 2019 en Algérie, Ali Ghediri, à 4 ans de prison ferme pour … un entretien au quotidien El Watan en décembre 2019.

En effet, Ali Ghediri est incarcéré depuis 32 mois et il est poursuivi pour, « participation, en temps de paix à la démoralisation de l’armée dans le but de nuire à la défense nationale ». L’unique élément d’accusation dans cette affaire, c’est un article de presse publié sur le quotidien algérien El Watan le 25 décembre 2018. C’est un entretien titré « Gaïd Salah face à une responsabilité historique ».

Le « tort » d’Ali Ghediri

Vers 10H30 de ce jeudi 27 janvier 2022, le procès en appel de Ali Ghediri a commencé et la juge a entamé ses questions. Ainsi, le général à la retraite a expliqué que son affaire est purement politique. Il assure que son seul souci est l’intérêt du pays et que l’entretien qu’il a accordé à la presse n’est rien qu’une opinion qui n’atteint en aucun cas à l’intérêt du pays. Déterminé, Ali Ghediri a expliqué que son seul « tort » c’est d’avoir utilisé son droit de se porter candidat aux présidentielles.

Il rappelle que beaucoup de citoyens qui ont été poursuivis pour la même accusation sont libres aujourd’hui, mais pas le candidat qu’il est. Il a également fait savoir à la juge que ses problèmes ont commencé bien avant, puisqu’il était en désaccord avec l’ancien Général de corps d’armée Ahmed Gaid Salah sur le 4e mandat d’Abdelaziz Bouteflika. Il a également fait savoir qu’il a été convoqué par la Direction générale de la sécurité intérieure connu par son nom de code « Antar », à propos de ses sorties médiatiques depuis 2015. Le jury est resté sans réactions face à ces révélations !

La « contradiction » du procureur

Après l’intervention de Ghediri, le procureur a fait une longue plaidoirie dans laquelle il a requis 20 de prison ferme contre Hocine Gouasmia, co-accusé d’Ali Ghediri. Ensuite, le procureur à surpris l’assistance, avec une intervention “complètement contradictoire”.

Il a montré sa conviction « qu’il n’y a aucun élément moral pour commettre le crime de la démoralisation de l’armée dans le but de nuire à la défense nationale » dans l’entretien que Ghediri a accordé à la presse, mais il a quand même requis 10 ans de prison ferme. Un réquisitoire qui a étonné et mis en colère les présents dans la salle d’audience.

Quelle ambiance dans la salle ?

L’assistance avait du mal à entendre les plaidoiries des avocats, la prise de parole des accusés et les questions de la juge. Il y’avait un bruit permanent dans le hall du tribunal, le micro ne fonctionnait pas souvent et le calme se faisait rare dans la salle d’audience.

Une salle d’audience archi-comble d’agents de sécurité en tenues officielles et en tenues civiles de plusieurs services de sécurité. Ils assuraient une haute surveillance à l’intérieure de la salle où le moindre geste de l’assistance était repéré. Des journalistes interdits d’utiliser leurs téléphones pour noter, des avocats interdits d’échanger quelques mots avec Ali Ghediri lors des petites pauses et le moindre mouvement de la famille du détenu valait un avertissement.

En plus de tous ces éléments qui perturbaient le déroulement du procès, les prévenu d’autres affaires n’arrêtaient pas de traverser la salle d’audience, les mains menottés ils étaient accompagnés de gendarmes ou de policiers afin de passer de l’autre côté du tribunal.

Du côté du jury, l’un des quatre jurés était malade et a quitté le procès à plusieurs reprises. Devant cette situation inédite, les avocats se demandaient si ce juré était concentré et s’il pouvait donner son jugement avec autant de va-et-vient pendant le procès !

Le mot de la fin d’Ali Ghediri

Après les plaidoiries qui ont démontré que le dossier était vide et que l’affaire est purement politique, Ali Ghediri a donné son mot de la fin. « J’ai servi l’Etat pendant 42 ans, ne laissez pas la politique piétiner les palais de justice. Soyez le refuge des pauvres et des riches » a-t-il conclu.  Des mot qui ne sont pas passés inaperçus pour l’assistance et les avocats qui ont applaudit pendant un bon moment le détenu politique.

Attente et stress

 Il était 17H quand le jury s’est retiré pour la délibération en laissant une famille et des sympathisants dans un stress incontrôlable.  Entre pessimisme et optimisme la salle connaissait de longs moments de silence et la brume de la cigarette a fini par traverser la porte de la salle, on pouvait sentir la cigarette des fumeurs qui se trouvaient dans le hall même à travers nos masques exigés par le protocole sanitaire anti-Covid-19.

Verdict et colère

À 19h45 le jury revient pour annoncer le maintien du verdict de première instance, soit 4 ans de prison ferme contre Ali Ghediri. L’assistance éclate de colère, maudit la « justice du téléphone » et martèle son soutien à « Si Ali ». Sa fille enceinte, son épouse, sa sœur, s’effondrent après avoir entendu le verdict. Les larmes aux yeux, ses sympathisants continuent à scander une justice aux ordres et son avocat Khaled Bourayou ne retient plus ses larmes.

Au milieu des pleurs et des cris on pouvait distinguer la voix de Ali Ghediri répéter à ses proches « Matatqalqouche », (ne vous inquiétez pas), avec un ton de quelqu’un qui rassure les siens.