Libération d'Ihsane El Kadi : Un acte d'apaisement salvateur à la veille des présidentielles ? - Radio M

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Libération d’Ihsane El Kadi : Un acte d’apaisement salvateur à la veille des présidentielles ?

Radio M | 08/06/24 20:06

Libération d’Ihsane El Kadi : Un acte d’apaisement salvateur à la veille des présidentielles ?

Les proches, amis et confrères d’Ihsane El Kadi, en prison depuis bientôt dix-huit mois, caressent l’espoir d’une éventuelle libération à l’occasion de la fête d’indépendance du 5 juillet.

C’est tout le mal que beaucoup, parmi ses soutiens, en Algérie et à l’étranger, lui souhaitent, lui dont le seul tort est d’avoir exercé son métier librement en portant la voix des sans voix et des marginaux. Lui dont le parcours professionnel se confond avec la lutte pour les causes justes, mais surtout en faveur de la liberté. Toutes les libertés. Cette liberté qu’il n’a cessé de défendre des décennies durant contre l’arbitraire et les dérives autoritaires. Pour lui, mais aussi pour les autres : les opprimés, les détenus d’opinion et les victimes d’injustice.

Jusqu’à la fin de 2022, Ihsane El Kadi, journaliste accompli et professionnel jusqu’au bout des ongles, est resté lui-même malgré un contexte politique défavorable marqué par une fermeture politique et un verrouillage médiatique sans précédent. Il est resté droit dans ses bottes malgré les intimidations, l’asphyxie financière de son entreprise et le renoncement, voire la démission, par opportunisme, par peur ou lassitude, de nombre de ses confrères.

Radio M, première web radio d’information dont il a été un des fondateurs, est restée l’un des rares espaces, sinon le seul, où pouvaient s’exprimer toutes les voix discordantes, toutes les tendances politiques, les voix marginales et les oubliés des médias lourds. Aucun sujet n’était tabou.

Économiste de formation, il animait des émissions qui se sont imposées comme des références dans le décryptage des questions économiques grâce à des invités de qualité dont le prix Nobel d’économie, Jean Tirole.

Sur le plan politique, les deux émissions phares « café presse politique » et « 5 sur 5 » étaient devenues de véritables tribunes politiques où tous les sujets étaient décortiqués y compris les plus sensibles. Durant le Hirak, ses médias ont fait de la couverture du mouvement leur devoir, en relayant toutes les manifestations et revendications populaires. Ce courage et sa foi inébranlable en un journalisme de qualité, s’ils ont suscité du respect auprès de l’opinion, ne l’ont pas cependant mis à l’abri des poursuites de la part d’un régime décidé à étouffer toute voix critique et hostile à toute expression libre.

Dans la nuit du 23 au 24 décembre 2022, des agents de la DGSI ont arrêté le journaliste. Il a passé plusieurs jours de garde à vue à la caserne « Antar » avant d’être placé, le 29 du même mois, sous mandat de dépôt à la prison d’El Harrach. Le lendemain, la mise sous scellés des locaux de Radio M et Maghreb Emergents s’est faite sans qu’aucune autorisation du procureur n’ait été présentée.

Le 12 octobre 2023, Ihsane El Kadi a épuisé tous les recours juridiques prévus par la loi. La Cour suprême a rejeté ses appels dans deux affaires distinctes, dont l’une lui avait valu une peine de 7 ans de prison.

Il faut dire que cette incarcération est la culmination d’une série d’intimidations depuis 2019 à l’encontre du journaliste.

En 2021, Ihsane El Kadi avait été placé sous contrôle judiciaire suite à une plainte d’Amar Belhimer, ex-ministre de la communication, pour un blog politique sur la place de Rached dans le Hirak publié en mars 2021. Deux chefs d’inculpation ont été retenus contre le journaliste : « atteinte à l’unité du territoire » et « publications portant préjudice à l’intérêt national ». Dans cette affaire, le journaliste a été condamné, le 7 juin 2022, à six mois de prison ferme et à une amende de 50 000 dinars.

Parallèlement à ces intimidations, le patron du laboratoire Merinal, Nabil Mellah, également actionnaire à Interface Médias, entreprise éditrice de Radio M, a été condamné à 4 ans de prison ferme. Il est en détention depuis mai 2021.

Pourquoi emprisonner ce journaliste, fils d’une grande figure révolutionnaire, et dont le seul tort est d’avoir fait son métier ? Pour les avocats, l’accusation de financement étranger n’est qu’un subterfuge pour condamner un journaliste indépendant. La condamnation injuste d’Ihsane El Kadi a suscité la solidarité de sommités internationales telles que l’intellectuel Noam Chomsky, la prix Nobel de littérature Annie Ernaux, la romancière Arundhati Roy, ou encore le réalisateur britannique Ken Loach ; ainsi que le soutien d’intellectuels algériens tels que des écrivains comme Yasmina Khadra, Meissa Bey ou Kaouther Adimi, les scientifiques Elias Zerhouni ou encore Nourredine Melikechi, qui réclament tous sa libération.
Comme nombre de détenus d’opinion, la place d’Ihsane n’est pas en prison. Sa place est au milieu des siens, au sein de sa corporation où il a beaucoup à apporter au métier et au pays. Dans cette perspective, le prochain anniversaire de la fête d’indépendance peut être une opportunité pour les autorités pour faire un geste en faveur de ces détenus injustement incarcérés. Ce serait non seulement un geste d’apaisement, mais une action qui pourrait aider à soigner l’image du pays écornée ces dernières années. Ce serait un acte en faveur de personnes dont l’amour de la patrie n’est pas à démontrer. Cela permettrait également d’entamer un processus de réconciliation entre l’Algérie et ses enfants qui ont dignement servi leur pays, renforçant ainsi les fondements d’une nation unie et résiliente face aux multiples défis auxquels elle est confrontée.


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