Ce n’est pas la première passe d’armes entre l’Algérie et les Émirats arabes unis, mais elle marque indéniablement un palier. En dénonçant publiquement des « actes hostiles » d’un pays arabe, Abou Dhabi en l’occurrence, Alger durcit nettement le ton face à celui qu’elle considère comme un adversaire de plus en plus gênant.
Derrière cette accusation à peine voilée, c’est bien le refroidissement inexorable entre les deux importantes puissances régionales qui transparait. Les griefs se sont accumulés côté algérien, au point de sortir provisoirement de la discrète diplomatie habituellement de mise entre États arabes pour fustiger ouvertement les Émirats.
Depuis deux ans, les relations se sont progressivement tendues entre ces deux poids lourds du monde arabe. L’Algérie accuse clairement les Émirats de mener une stratégie de déstabilisation à grande échelle pour entraver ses intérêts en Afrique.
Le rapprochement spectaculaire entre Abou Dhabi et le Maroc, grande rivale régionale de l’Algérie, cristallise les tensions. De même que la coopération accrue des Émirats avec Israël, autre partenaire stratégique de Rabat. Pour Alger, la menace est claire : un axe Abou Dhabi-Tel Aviv-Rabat œuvrant dans l’ombre contre ses ambitions régionales.
Outre cette alliance de ses adversaires, l’Algérie reproche plus directement aux Émirats des manœuvres pour contrer son influence grandissante au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Le financment de pays de la région pour détériorer les rapports entre Alger et ses voisins sont également pointés du doigt.
Bref, les autorités algériennes sont persuadées de l’existence d’une vaste entreprise émiratie pour brider le pays sur son propre terrain de jeu. La convocation des plus hautes instances de sécurité nationale autour du président Tebboune souligne qu’Alger ne compte pas laisser passer cette offensive. Quitte à mettre de l’huile sur le feu et à attiser une dangereuse surenchère géopolitique régionale avec Abou Dhabi.
En effet, sur les dossiers régionaux et en géopolitique, tout oppose les deux pays : Alger est plus proche de la Turquie, du Qatar et de l’Iran alors que les Émirats sont les alliés d’Israël et du Maroc. Sur le dossier libyen, les deux pays s’opposent également : Abou Dhabi soutient le maréchal Haftar, l’homme fort de l’est libyen, alors qu’Alger soutient Tripoli.
