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Chute du prix du Sahara Blend : l’économie algérienne à la croisée des chemins

Ghada Hamrouche | 23/04/20 06:04

Chute du prix du Sahara Blend : l’économie algérienne à la croisée des chemins

Le prix du panier de quatorze pétroles bruts a chuté, mardi 21 avril, à 14,6 dollars, selon l’OPEP, Organisation des pays exportateurs de pétrole. Ce panier de référence depuis quinze ans, comprend, autres autres, le Girassol d’Angola, le Sahara Blend d’Algérie, l’Iran Heavy, l’Arab light d’Arabie Saoudite, le Basra light d’Irak et le Mery du VenezuelaA New York,le même jour, le cours de WTI, West Texas Intermediate, américain pour livraison en juin 2020, valait 11 dollars le baril, en baisse de 4,7% (les valeurs pour les livraisons de mai du pétrole américain sont négatives). La décision de l’OPEP et ses alliés, prise le 12 avril 2020, de baisser la production sur trois phases pendant deux ans ne semble pas avoir eu de l’effet sur les cours. L’OPEP + a décidé de réduire la production de dix millions de barils par jour à partir du 1 mai 2020. La demande a chuté de 6 millions barils/jours et l’offre excédentaire, jumelées à la crise sanitaire mondiale du Coronavirus, ont maintenu les cours à un niveau bas. En quatre mois, le pétrole a perdu plus de 60 % de sa valeur en raison également de l’effondrement de l’activité économique après les mesures de confinement sanitaire prises par plusieurs pays. Par exemple, le secteur du transport aérien, gros consommateur d’énergie, fonctionne au ralenti, des milliers d’avions sont cloués au sol. Le surplus au niveau des stocks pétroliers mondiaux et la décision de Moscou et de Ryad d’augmenter leurs productions en mars 2020 a ont compliqué la situation. La Russie, pays non membre de l’OPEP, a augmenté sa production de 500.000 barils/jour estimant que la politique des quotas, adoptée par l’OPEP et ses alliés en 2016, favorisait les producteurs américains. L’Arabie Saoudi a pris la même décision en augmentant sa production de 25 %. Ryad et Moscou ont finalement accepté de reconsidérer ces décisions nocives pour le marché des hydrocarbures.

« Double peine »

A partir du début du mois prochain, l’Algérie pays va réduire sa production de 240.000 barils/jour, en application de la décision de l’OPEP +. « L’économie de notre pays va subir une double peine : une réduction de l’ordre de 20% de nos exportations et de ses revenus pétroliers, avec l’effondrement du prix du pétrole et le déclin corrélatif du prix du gazLes éléments d’une sortie de crise sont connus et ont fait l’objet de propositions concrètes qui n’ont malheureusement pas eu d’effets notables : sobriété au niveau de la consommation énergétique, développement accéléré des énergies renouvelables, efficacité de nos moyens de production et diversification de l’économie nationale, autant d’éléments sur lesquels doit reposer le débat annoncé sur la refondation de la politique énergétique nationale. En ce qui concerne l’OPEP, il faudrait débattre des avantages et inconvénients de notre appartenance à l’Organisation. En qualité de membres, nous sommes de nouveau appelés à contribuer à éponger un excédent de stock global dont nous ne sommes nullement responsables. Lors de la crise de 2014, j’avais déjà évoqué l’idée d’une «sortie» de l’OPEP suite au comportement erratique de l’Arabie Saoudite », a expliqué, dans une interview à El Watan, Nordine Aït Laoussine, ancien ministre de l’Energie. Selon Mohamed Arkab, ministre de l’Energie, la réduction de l’exportation du pétrole de 20 % ne va pas impacter les recettes de l’Etat puis que les quantités mises à l’exportation ne seront pas touchées, estimée à 600.000 barils/jours. Mais, la stratégie de l’Algérie, du moins à moyen terme, est batie sur une reprise des cours pétroliers, ce qui n’est pas encore le cas. «Une relance du marché pétrolier est attendu pour le deuxième semestre de 2020 avec une reprise graduelle de la demande qui va permettre de rééquilibrer le marche avec l’application de l’accord de l’OPEP et Non OPEP (du 12 avril). Le recul de la pandémie du Covid-19 va aussi permettre la levée du confinement durant la deuxième moitié de 2020 ainsi que la reprise des activités économiques », a prévu, dans une déclaration à la Chaine III de la radio nationale, Mohamed Arkab, ce mercerdi 22 avril.

L’Algérie va-t-elle recourir à l’endettement extérieur ?

L’Algérie est, d’après les analystes, tenue d’agir sur la demande locale d’énergie, considérée comme importante avec l’équivalent de 400.000 barils/jours. Le ministère de l’Énergie prépare un plan pour « consommer utile » mais dont l’application sur le terrain risque de prendre beaucoup de temps. Le groupe Sonatrach va réduire ses investissements et ses charges d’exploitation de 50 % pour passer à 7 milliards de dollars. « Les mesures nécessaires pour faire face à la chute des prix du pétrole ont été prises lors du Conseil des ministres tenu il y a un mois. Nous avons prévu cette crise et nous avons pris nos précautions. Nous espérons Inchallah que le marché mondial reprendra son souffle et que les prix remontent aux niveaux qui soulagent et les producteurs et les consommateurs», a déclaré Mohand Oussaud Belaid, porte-parole de la Présidence de la République, lors d’une conférence de presse tenue au siège de la présidence, mardi 21 avril. Fin mars 2020, le Conseil des ministre a décidé de réduire la facture de l’importation de 10 milliards de dollars et de baisser le budget de fonctionnement de l’Etat de 30 % sans toucher aux salaires et aux dépenses liées à la santé et à l’éducation. Autre décision : arrêt de conclusion des contrats d’études et de services avec les bureaux étrangers, une économie estimée à 7 milliards de dollars par an. L’Algérie va-t-elle recourir à l’endettement extérieur ? « Nous aurions pu préserver ce qui restait de ces stocks en devises si des mesures efficaces avaient été prises par le passé, soit par des réformes structurelles de fond susceptibles d’améliorer l’offre domestique et réduire, par là même, l’excès de la dépense intérieure, soit par la diversification des moyens de financement, dont le recours à l’endettement extérieur pour le financement des investissements et certains projets d’équipement. Le fait de dire que nous n’allons pas recourir à l’endettement extérieur n’a aucun sens, car il va falloir s’endetter pour ne pas gripper l’investissement et la machine économique », a déclaré, dans une interview à Liberté, ce mercredi 22 avril, Badreddine Nouioua, ancien gouverneur de la Banque d’Algérie. Début février 2020, les réserves de changes de l’Algérie étaient estimées à 62 milliards de dollars. Elles étaient de 97 milliards de dollars fin 2017.