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Après 23 ans, Amnesty Internationale relance l’appel à la justice pour les victimes du Printemps Noir

Radio M | 20/04/24 15:04

Après 23 ans, Amnesty Internationale relance l’appel à la justice pour les victimes du Printemps Noir

Plus de 20 ans après les événements tragiques du Printemps Noir en Kabylie, l’ONG Amnesty International renouvelle ses appels à faire toute la lumière sur la violente répression des manifestations par les forces de l’ordre en 2001. 

Dans un communiqué publié ce samedi, l’organisation de défense des droits humains exhorte les autorités à diligenter des “enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales”afin d’identifier les responsables des nombreuses victimes parmi les manifestants et de les traduire équitablement en justice.

“Les conclusions de la commission d’enquête doivent donner lieu à des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales visant à identifier les responsables des homicides de manifestants commis depuis avril 2001 et faire en sorte qu’ils soient traduits en justice dans le cadre d’un procès équitable”, écrit l’ONG.

Ces propos font écho aux tragiques événements qui ont secoué la région berbérophone d’Algérie il y a 23 ans. Le 18 avril 2001, la mort du jeune lycéen Massinissa Guermah, abattu par un gendarme à Beni Douala, a mis le feu aux poudres. Des manifestations pacifiques ont d’abord eu lieu pour dénoncer ce drame. Différentes couches populaires participent à la protestation.

Cependant, les forces de l’ordre n’ont pas tardé à répliquer dans une violence extrême. Les manifestations sont réprimées par les forces de l’ordre (notamment la gendarmerie nationale) qui tirent à balles réelles sur les manifestants; pour la plupart, des collégiens ou des lycéens.

Une insurrection populaire réprimée dans le sang

Face à cette brutale répression, la population kabyle s’est soulevée massivement. De violentes émeutes ont lieu pour dénoncer les injustices et les abus d’autorité. De nombreux bâtiments officiels sont détruits par le feu ou pris d’assaut par les jeunes émeutiers.

S’en sont suivis de longs mois d’affrontements sanglants entre les forces de l’ordre et les manifestants, faisant des dizaines de morts et des centaines de blessés parmi ces derniers. 

Au fil des semaines, ce vaste mouvement de contestation, d’abord spontané, s’est progressivement structuré autour de nouvelles organisations citoyennes comme le “Mouvement citoyen des Aarchs” et la “Coordination des âarchs, daïras et communes”. 

Leurs revendications ont également évolué, dépassant le cadre initial pour réclamer “la satisfaction de la revendication amazighe dans toutes ses dimensions (…) et la consécration de tamazight en tant que langue nationale et officielle.” Certaines franges sont même allées jusqu’à militer pour l’autonomie de la Kabylie, à l’image du Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK), marginalisant les partis politiques berbères traditionnels comme le FFS et le RCD.

Sous l’intensité de cette révolte populaire inédite, Abdelaziz Bouteflika, président de la République alors, a fini par accorder d’importantes concessions. Les gendarmes ont été retirés de Kabylie, tandis que la langue amazighe a été d’abord reconnue comme langue nationale dans la Constitution de 2002, puis consacrée comme langue officielle en 2016.

Cependant, de nombreuses zones d’ombre persistent autour des événements tragiques de 2001 et de la violente répression qu’ils ont entraînée. C’est pourquoi Amnesty International appelle aujourd’hui à la tenue “d’enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales” pour “identifier les responsables des homicides de manifestants” et permettre qu’ils soient “traduits en justice dans le cadre d’un procès équitable”.

Plus de deux décennies après ces faits, les familles des victimes réclament toujours que justice soit rendue et que la vérité éclate au grand jour.