Affaire Ihsane El Kadi et les journalistes emprisonnés en Algérie: ce qu'a dit Tebboune - Radio M

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Affaire Ihsane El Kadi et les journalistes emprisonnés en Algérie: ce qu’a dit Tebboune

Radio M | 07/05/23 14:05

Affaire Ihsane El Kadi et les journalistes emprisonnés en Algérie: ce qu’a dit Tebboune

Le chef de l’Etat Abdelmadjid Tebboune a encore une fois nié le fait qu’il y ait des journalistes en prison pour leur travail de journaliste. Sans le citer nommément, il a évoqué, dans l’entrevue accordée aux médias nationaux, le cas du journaliste Ihsane El Kadi, condamné à cinq ans de prison. La veille, le représentant de RSF lui avait remis une lettre lui demandant la libération d’Ihsane El Kadi.

Au cours de cette entrevue avec les représentants de nombreux médias nationaux, Abdelmadjid Tebboune a nié l’existence de journalistes en prison en Algérie. Il a seulement admis, en banalisant les faits, que des journalistes, qu’ils nomment pas au demeurant, ont été placés sous contrôle judiciaire ou sont passés par la case prison pour de courts séjours. Pourtant deux journalistes sont en prison en 2023 : Ihsane El Kadi, directeur de Radio M et de Maghreb Emergent et Mustapha Bendjama, rédacteur en chef du quotidien régional Le Provincial.

« On dit qu’il y a mobilisation pour des journalistes en prison. Où sont les journalistes en prison chez nous ? Il n’y a pas de journalistes chez nous en prison ! il y a des journalistes qui ont été emprisonné peut-être pendant deux ou trois mois », a affirmé Abdelmadjid Tebboune dans cette entrevue réalisée le 4 mai et diffusée samedi en soirée sur quelques chaines de télévision.

« C’est possible qu’il y ait des journalistes que la justice a préféré mettre sous contrôle judiciaire au lieu de les emprisonner », a ajouté Abdelmadjid Tebboune, allusion aux journalistes comme Said Boudour, Saad Bouakba et Youcef Salami du quotidien Liberté.

En réponse à une question sur le classement de l’Algérie établi dans le rapport annuel de RSF sur la liberté de la presse dans le monde, Abdelmadjid Tebboune a indiqué ne pas reconnaitre le classement de cette ONG et que sa seule référence était celui des nations unies qui est, selon lui, « impartial ».

« Le classement de l’autre (RSF), je ne le prends pas comme base parce que je sais et je vois », a-t-il répondu.

« C’est difficile de parler de ces organismes qui se donnent un poids international. RSF reste une organisation non gouvernementale. Le seul classement que je dois prendre en considération est celui des nations unies et ses institutions. Le classement de cette ONG, ceux qui ont crée cette ONG, ceux qui dirigent cette ONG, et ceux qui orientent cette ONG, c’est comme je l’ai dit à plusieurs reprises : ils pensent que l’Algérie est une proie facile », a-t-il expliqué.

La veille de cette entrevue, soit le 3 mai, Abdelmadjid Tebboune avait organisé une cérémonie au Centre international des conférences (CIC) à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse. Tous les regards étaient braqués sur cette cérémonie, où le représentant de RSF pour la région Mena et Afrique du Nord, Khaled Drareni devait lui remettre une lettre portant une série de recommandations, dont la libération du journaliste, Ihsane El Kadi, l’abandon des charges retenues contre lui et contre l’entreprise Interface Médias, éditrice de Radio M et de Maghreb Emergent.  

Et le lendemain de cette réception, Abdelmadjid Tebboune a évoqué le cas d’Ihsane El Kadi qu’il avait traité auparavant, dans une autre entrevue avec les médias, de « Khabardji » (informateur) et dans laquelle il avait admis, en des termes vagues, être à l’origine de son arrestation et la fermeture de ses médias.

« Concernant le dernier qui a été condamné par la justice, il n’est pas condamné parce qu’il est journaliste, mais parce qu’il a reçu de l’argent de l’étranger. Ni les Etats-Unis, ni les pays européens, ni aucun pays n’accepterait que ses journalistes soient financés de l’étranger pour s’attaquer à lui (l’Etat) », a affirmé Tebboune aux journalistes en faisant référence au journaliste Ihsane El Kadi, condamné à cinq ans de prison, dont trois ans ferme le 2 avril dernier, et dont les locaux des médias qu’il dirige ont été mis sous scellés le 24 décembre 2022.

Khaled Drareni, accusé aussi de « Khabardji », lorsqu’il était en prison, par Abdelmadjid Tebboune, a déclaré sur Alternatv qu’il était « optimiste » après cette rencontre au cours de laquelle il a remis, en main propre, la lettre de RSF au chef de l’Etat. « Je lui ai remis la lettre en main propre et je lui ai demandé à deux reprises de libérer Ihsane El Kadi. Il y a eu en face de moi un Président qui a été à l’écoute et qui n’a pas été comme d’habitude violent quand on lui parle d’Ihsane El Kadi (…) je garde un sentiment d’optimisme », a déclaré le représentant de RSF. Placé en détention le 29 décembre 2022, le journaliste Ihsane El Kadi a été condamné le 2 avril à cinq ans de prison, dont trois ans ferme et une amende de 700 000 dinars. Il est poursuivi pour « financement étranger » sur la base de l’article 95bis du code pénal. Ses avocats dénoncent un procès politique et relèvent des irrégularités et des violations de procédures dans cette affaire. Son procès en appel est prévu le 21 mai prochain.