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Accord algéro-français de 1968: Xavier Driencourt veut le casser

Radio M | 29/05/23 14:05

Accord algéro-français de 1968: Xavier Driencourt veut le casser

Par Oussama Nadjib

Dans une note, présentée comme une étude, publiée par le think tank français de droite, Fondapol (Fondation pour l’innovation politique), l’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt préconise au gouvernement français de dénoncer unilatéralement l’accord algéro-français du 27 décembre 1968 qui définit les conditions de circulation, de séjour et de travail des Algériens en France.
Fondapol, qui est avec l’institut Montaigne l’un des deux plus importants think tanks en France, se veut la boite à idée de la droite, laquelle pour reprendre la sémiologue Cécile Alduy, professeure à Stanford (Californie) fait sur l’immigration un “copier-coller presque complet du RN” de Marine Le Pen.
Fondapol a publié en mars dernier une autre note visant à démontrer que la France était le pays le “plus laxiste” d’Europe en matière d’immigration. Autant dire que le texte de Xavier Driencourt, publié ce mois-ci, s’insère dans cette thématique hautement politique et très droitière sur l’immigration.
L’idée de “laxisme” est encore davantage accentuée pour le cas de l’Algérie du fait que le séjour des Algériens relève d’un traité international qui, par essence, prime sur les lois internes. L’ancien ambassadeur de France à Alger- même s’il évoque subrepticement que l’accord de 1968 répondait très largement aux besoins de l’économie française pour une main d’œuvre bon marché – trouve ce régime particulier est insupportable car il accorde aux ressortissants algériens un “statut dérogatoire” au droit commun. Il faut rappeler aussi que l’accord de 1968 mettait fin à un régime en vigueur de libre-circulation et que d’un point de vue du droit sa dénonciation pourrait signifier un retour au statu-quo ante. Donc à la libre-circulation.
Outre des arguments déjà entendus, notamment au sein de la mouvance lepéniste, sur l’excès de “privilèges” accordés aux Algériens, sur le caractère “dépassé” de l’accord datant de 1968 et sur l’obligation de tenir compte du “contexte politique” (entendre le discours anti-immigration), Xavier Driencourt estime qu’une remise en cause des “acquis” de 1968 n’est pas possible par le renégociation.

Alger “rappellera son ambassadeur” mais finira par accepter…

L’option, explique-t-il, a déjà été tentée à plusieurs reprises sans que la France ne parvienne à “obtenir une remise en cause de la philosophie générale de l’accord.” Plutôt que d’aller dans cette voie “illusoire”, il faut engager le bras de fer avec l’Algérie en dénonçant unilatéralement l’accord d’autant, affirme-t-il, que les autorités algériennes “s’attendent plus ou moins et même si elles ne le disent pas clairement, à une telle évolution qu’elles jugent inéluctable.” Driencourt se permet même d’avancer que les autorités algériennes sont plutôt étonnées que Paris “n’ait pas déjà pris l’initiative de mettre fin à l’accord du 27 décembre 1968”. Mais en tout état de cause, la dénonciation unilatérale de l’accord est gérable et souhaitable, estime l’ancien ambassadeur de France en Algérie. Bien sûr, explique-t-il, Alger dénoncera une telle initiative et “comme à chaque crise, rappellera son ambassadeur à Paris”. Mais, ajoute-t-il, la France peut dénoncer sans risques majeurs l’accord franco-algérien de 1968 et il n’y aura pas de retour au statu-quo ante, vers la libre-circulation. La difficulté n’est pas “juridique mais politique” mais, conclut-il, “un gouvernement désireux de remettre de l’ordre dans notre politique migratoire devra franchir le pas”.

De quoi et de qui Xavier Driencourt est-il le nom?

L’avantage d’une démocratie où la liberté d’expression est consacrée est que les anciens responsables peuvent s’exprimer sans engager formellement leur gouvernement. Cela donne la possibilité d’envoyer des messages politiques sans engager la responsabilité des autorités. Cela n’empêche de poser la question de savoir de quoi et de qui Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie est-il le nom? Certains à Alger mettent les ardeurs publicistes de M.Driencourt à la frustration d’un homme qui n’aura pas réussi à faire bouger les choses durant ses deux passages en Alger (2008-2012, 2017- 2020). Ses écrits porteraient ainsi la marque de cet échec présumé avec un appel à engager une politique de “rapport de forces”, seul “langage” qui marche avec Alger, selon lui.
Une telle explication paraît courte. Le parcours général de l’homme au sein du Quai d’Orsay est celui d’un membre agissant de l’establishment français. Son discours “offensif” sur l’Algérie viserait plutôt à mettre sur le champ médiatique les “sujets qui fâchent” alors que les officiels en titre, Macron en tête, chercheraient une voie pragmatique pour faire avancer les choses avec l’Algérie. Mais, c’est ce que la démocratie permet, le discours de Driencourt peut également être une forme de partage des tâches, l’ancien ambassadeur se chargeant de faire le “dur” en évoquant, publiquement, des options de confrontations. Mais il ne faut pas exclure néanmoins l’idée que le but de ces sorties est de parasiter le débat à la veille de la visite vaguement annoncée du président Tebboune à Paris vers la mi-juin. Dans une de ses notes, Fondapol explique que la “France est de plus en plus à droite”. Comme Xavier Driencourt…. ?