Traditions vestimentaires : Le caftan est algérien ! - Radio M

Radio M

Traditions vestimentaires : Le caftan est algérien !

Radio M | 23/10/22 22:10

Traditions vestimentaires : Le caftan est algérien !

Contrairement à ce qu’on veut faire accroire outre frontières, le caftan est bel et bien une tenue traditionnelle algérienne, certes originaire d’Asie Mineure.

Par Kamel Bouslama

Il fut en effet porté d’abord par les anciens peuples de la Perse antique qui lui donnèrent le nom de «khaftan», puis repris par les tribus turques qui, à leur tour, lui donneront le nom de «biçilmis kaftan».
Le caftan fut introduit en Algérie par les routes de l’Orient, lors de l’apogée de l’Empire ottoman en l’an 1515. Mais il faut savoir que l’introduction de cette noble tenue dans la tradition vestimentaire de notre pays a d’abord été faite par la gent masculine et bourgeoise ottomane. Les premiers Algériens qui ont porté le caftan étaient pour ainsi dire des hommes de haut rang, affiliés au pouvoir mis en place depuis l’an 1515 et ce, jusqu’à l’année 1830, début de l’occupation française. Au départ, c’était une fine veste en brocard avec des motifs somptueux et parfois même des galons d’or pour les souverains et notables les plus coquets. Toujours est-il qu’au fil du temps, il sera de plus en plus popularisé ; à leur tour, les caïds des tribus algériennes porteront ce vêtement, avec cependant plusieurs touches personnalisées. 

Mais le caftan est aussi et surtout l’un des plus beaux vêtements présents aujourd’hui dans les garde-robes des femmes algériennes citadines ou de haut rang. Car pour leur part, celles-ci ne tarderont pas à lui imprimer des touches féminines locales tout en continuant d’en respecter le patron originel, à savoir cette large étoffe de tissus luxueux en forme de veste longue et ouverte. Ainsi le génie des artisanes algériennes dans les métiers du textile donneront un nouvel aspect au caftan, en lui incorporant des motifs luxueux hérités du faste des anciennes dynasties berbéro-musulmanes. Par la suite, plusieurs types de caftans feront leur apparition dans notre pays, tout en respectant le patron originel de celui évoqué plus haut. A ce titre, il est important de rappeler, que le caftan féminin en Algérie n’était porté que par les femmes citadines uniquement, dont celles des villes d’Alger, Annaba, Bejaia, Blida, Constantine, Miliana, Nedroma ou encore Tlemcen, qui en feront d’ailleurs un composant essentiel dans la garde-robe nuptiale de la mariée.


Le caftan algérien fut introduit dans le sultanat de Fès en 1832

Cette noble tenue aura su ainsi charmer non seulement la haute société algérienne, mais aussi celle du sultanat de Fès qui suivait de près les modes importées d’Algérie. Il a fallu en effet attendre le milieu du XIXe siècle pour que le caftan soit popularisé chez les populations du Sultanat de Fès par le biais des immigrations massives de familles algériennes venues chercher refuge dans cette ville pour fuir les persécutions dues à la colonisation française. Pour tout dire cette tenue traditionnelle sera introduite en 1832 dans la capitale du Sultanat de Fès, par les réfugiés algériens de Tlemcen et Mascara dénommés «Ahl Tlemsan» et fuyant l’armée d’occupation française et ses persécutions. Tout cela bien avant que le Maroc ne soit connu comme tel, car autrefois il était partagé en deux sultanats rivaux et indépendants : celui de Fès et celui de Marrakech. Les maîtres artisans de Fès appelleront donc ce caftan algérien «qaftan b’ tarz dziri», littéralement «caftan à la broderie algérienne», comme pour rappeler l’origine de cette somptueuse tenue traditionnelle. Les femmes algériennes feront aussi connaitre le caftan dans plusieurs autres villes et régions du Maroc, plus précisément dans les villes de Tanger, Oujda et surtout Tétouan, fortement marquées alors par la culture algérienne. Selon le professeur, journaliste, écrivain et poète marocain, Driss Bouhlila, cet apport culturel algérien est ainsi redevable aux milliers de familles qui ont fui l’Algérie colonisée en 1832. Aujourd’hui, nombreux sont les couturiers algériens se remettant à faire de nouveaux modèles de caftan, un peu plus modernisé avec de nouvelles matières, mariant ainsi le gout de la femme algérienne à son époque actuelle.


Les différentes variantes du caftan algérien

Présentées sommairement, voici différentes variantes de caftans algériens  telles le caftan en brocard, héritage ottoman auquel les femmes algériennes apporteront des motifs floraux très colorés. Ce caftan est garni de soutaches (galon fin et sobre) et de passementerie au fil d’or. Il a la particularité d’avoir des boutonnières des deux côtés, ce qui permet de mettre en valeur le gilet du dessous ; le caftan en velours, héritage ottoman aux influences algériennes notables tant dans les motifs d’ornementation que dans les techniques de broderies employées notamment la «fetla» ou/et le «mejboud».  À ce titre, il faut savoir que dans la composition du costume nuptial de la mariée de Tlemcen, pour ne citer que cette variante-là, il y a la «lebset el arftan», tenue classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Le caftan en soie, héritage citadin algérien, ce caftan léger se porte sur un caftan de velours le mettant en évidence par sa transparence. Dans certaines villes du pays on le nomme «dfina» ou «mansouria» ; le caftan en laine fine, réservé aux domestiques des grandes maisons et des palais ou à la classe moyenne algérienne.Ce caftan était moins noble mais a conservé sa fonction première de vêtement.