Retour sur le procès de l’ancien policier Zahir Moulaoui et du militant Lyes Chibane - Radio M

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Retour sur le procès de l’ancien policier Zahir Moulaoui et du militant Lyes Chibane

Lynda Abbou | 26/04/22 23:04

Retour sur le procès de l’ancien policier Zahir Moulaoui et  du militant Lyes Chibane

Le verdict dans l’affaire de l’ancien policier Zahir Moulaoui, et du militant Lyes Chibane, incarcérés à la prison de Koléa a été renvoyé par la juge du tribunal de Sidi M’hamed au 10 mai prochain. L’équipe de Radio M a assisté au procès qui a eu lieu ce matin.

Les deux détenus d’opinion n’étaient pas physiquement présents au tribunal. Ils ont été jugés à distance à travers un appel vidéo. Sauf qu’un problème technique a empêché le procès de commencer à l’heure. Les deux détenus ont été appelés mais le service administratif de la prison de Koléa ne décrochait pas, ça sonnait et ça ne répondait pas. Une situation qui a duré plus d’une vingtaine de minutes.  

Entre temps la partie civile qui est le trésor public a demandé le report mais la défense des deux militants a refusé cet éventuel renvoie qui va selon eux pénaliser les prisonniers. Ils ont eu gain de cause et le procès aura lieu dès que l’administration de la prison de Koléa répond au téléphone.

Un problème technique qui a ouvert le débat au sein de la salle d’audience sur les jugements à distance malgré l’ouverture post-Covid sur pratiquement tous les plans. Les avocats ont à cet effet rappelé à la juge, la nécessité de la présence des prisonniers au tribunal qui est une des conditions d’un procès équitable.

Koléa a finalement décroché et les deux détenus apparaissent au fond d’un écran. Ils sont poursuivis pour les mêmes accusation que la majorité des activistes en Algérie, à savoir ; « diffusion et publication des fausses informations ayant pour but atteinte à l’ordre public, atteinte à l’intégrité et l’unité nationale, incitation à attroupement et outrage à corps constitué ».   

Zahir Moulaoui répond aux questions de la juge et rejette toutes les accusations retenues contre lui tout en assumant son soutien au détenu d’opinion et son activisme au sein du Hirak dans un cadre pacifique. Il a rappelé qu’il a passé 31 ans dans la police algérienne et que ce n’est pas possible qu’il atteint l’unité nationale ou l’ordre public.

Les faits retenus contre lui sont des publications Facebook à travers lesquels il se solidarise avec les détenus d’opinion. Le second fait c’est sa présence le 5 octobre 2021 à la maison de culture de Bejaia et d’avoir scandé « Dawla madania machi aâskaria », (Régime civile et non pas militaire ».

Quant à Lyes Chibane qui est poursuivi pour les mêmes chefs d’inculpation, a demandé à la justice d’avancer une seule publication Facebook si elle existe. « Je défis qui que ce soit de ramener une preuve que j’ai publié sur Facebook, il est impossible car tout simplement ça fait deux ans que je n’ai pas ce réseau social » a répondu Lyes Chibane pour rejeter les accusations retenues contre lui.  

Il s’est alors avéré que les faits cités dans son dossier sont une discussion Whatsapp privée et un livre titré « Pouvoir assassin », perquisitionné chez lui.

La procureur de la république a requis 3 ans de prison ferme et une amende de 200.000 DA sans plaider, chose qui a poussé les avocats dont Me Mourad Zenati à se demander pourquoi la procureur n’a ni plaidé ni présenté des éléments de preuves. « Ceci montre que soit le dossier et vide soit il est politique » a plaidé l’avocat.

De son côté, Me Mustapha Bouchachi a été « étonné de la crédibilité » donnée aux PV de la police judicaire qui selon lui travaille sous ordres politiques et qui a pris le dessus sur la justice. « Il n ya plus de lois, il y a des ordres » a martelé Me Bouchachi.

Un point de vue partagé par d’autre avocats du collectif de la défense. Me Sonia Mokrane qui s’est constituée pour défendre Zahir Moulaoui a signalé dans sa plaidoirie que le procès est purement politique et que l’accusé est en prison uniquement pour avoir manifesté en tenue officielle de la police ».

Me Mourad Zenati et Me Brahim Hammour ont  également noté qu’il y a « une vengeance dans l’affaire de Zahir Moulaoui, pour avoir osé manifester en tenue de policier et pour avoir été le premier à le faire ».  

L’autre point qui a fait l’unanimité chez les avocats c’est l’absence de l’identification du corps constitué qui a été cité dans le dossier ni l’explication de la présence du trésor public dans cette affaire.  En outre, ils ont tous sollicité la juge afin de rendre le verdict aujourd’hui puisque nous sommes à quelques jours de l’Aid, mais elle l’a renvoyé au 10 mai 2022.

A rappeler que les deux détenus ont été placés sous mandat de dépôt le 12 octobre 2021. Le 16 mars dernier, la chambre d’accusation avait décidé de renvoyer le dossier de Zahir Moulaoui et Lyes Chibane devant le tribunal correctionnel de Sidi M’hamed, après avoir éliminé les accusations criminelles.