Vendredi 43- Répression sans précédent à Oran: l'esprit du Hirak attaqué - Radio M

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Vendredi 43- Répression sans précédent à Oran: l’esprit du Hirak attaqué

Said Djaafer | 14/12/19 07:12

Vendredi 43-  Répression sans précédent à Oran: l’esprit du Hirak attaqué

Les témoignages confortés par des images concordent: les manifestants du Hirak étaient attendus vendredi à Oran par les services de sécurité qui ont été particulièrement durs. Aucune raison ne justifiait cette gestion musclée, les manifestants étaient, comme lors des vendredis précédents, pacifiques et non-violents. C’est le fait même de manifester, l’esprit même du Hirak, une occupation pacifique et bon enfant de l’espace public, qui semble avoir été  ciblé en ce 43ème vendredi du mouvement populaire à Oran et premier jour post-élection.

https://twitter.com/FerielKs/status/1205584938592088070

 Ce qui est arrivé est-il annonciateur d’une reprise en main autoritaire, très risquée, destinée à étouffer le Hirak dans l’ensemble du pays? La question mérite d’être posée. Mais les faits, eux, sont clairs. Oran a été, ainsi que le souligne le  bureau d’Oran de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) le théâtre d’une répression de masse qui s’est “transformée en véritable chasse à l’homme contre les citoyens”. 

“Un dispositif policier d’une ampleur jamais vue ces derniers mois a transformé le centre ville d’Oran en état de siège et les citoyens en ennemie à abattre. Les forces de polices ont usé de violence, matraque, gaz lacrymogène pour disperser les manifestants pacifique sans distinction, à la place 1er novembre et les poursuivant tout l’après midi dans les rues et ruelles, au niveau de plusieurs places. Des hommes et des femmes ont été brutalisés et arrêtés sans retenue. Chaque groupe de jeune gens se reformant ont subis les foudres des forces de l’ordre”. Le bureau de LADDH fait état d’une centaine d’arrestations dont “ des journalistes et des photographes, durant tout l’après midi”. 

La LADDH parle d’une  “volonté de punir la population d’Oran et le hirak”. Les témoignages convergent et le confirment : à Oran les services de sécurité étaient déterminés à empêcher le Hirak.  “ils n’ont épargné personne,ni hommes,ni femmes,ni enfants …ni même le drapeau.

Ils embarquaient, matraquaient, insultaient à l’aveugle,du gaz lacrymogène en plein figure d’enfants , des coups de Rangers dans les parties intimes des garçons, des mots orduriers aux femmes.”

Cette brutalité, inhabituelle, est-elle un message à destination de l’ensemble du pays, Oran, la seconde ville du pays, servant de laboratoire à une tentative de liquidation autoritaire du hirak? S’agissait-il en ce premier jour post-élection de mettre au pas toutes les autres régions du pays afin de donner corps à l’idée, farfelue, vendue par les défenseurs médiatiques du régime, d’une contestation populaire limitée à Alger et la Kabylie?  Ou alors, ainsi que le suggère, l’universitaire Fayçal Sahbi, une action délibérée destinée à casser un hirak oranais “plus homogène, plus compact, peut-être même plus structuré et où l’on peut dégager, plus ou moins, facilement des représentants”? 

Une sorte de “preemptive action” du pouvoir destinée à étouffer dans l’œuf toute ébauche d’organisation dans une ville où les liens tissés par les acteurs du Hirak la rendent plus aisée qu’ailleurs? Une analyse qui ne manque pas d’intérêt. Mais le fait que cette répression, inhabituelle, survient au lendemain d’un scrutin contesté, semble être également un message plus global. Oran, deuxième ville du pays, servant de test d’une ébauche d’une reprise en main autoritaire qui pourrait s’étendre au reste du pays.