Procès d’Alger : Ministres et hommes d’affaires tenus de rembourser le Trésor public, Achaibou, Rebrab et Emin Auto - Radio M

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Procès d’Alger : Ministres et hommes d’affaires tenus de rembourser le Trésor public, Achaibou, Rebrab et Emin Auto

Radio M | 11/12/19 09:12


Le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, a rendu, ce mardi 10 décembre, son verdict dans l’affaire des avantages illégaux accordés dans les projets d’unités de montage et du financement occulte de la campagne d’Abdelaziz Bouteflika.

Le juge a ordonné aux anciens Premiers ministres, ministres et hommes d’affaires de verser au Trésor public, partie civile dans l’affaire du montage des véhicules, une somme de 20 milliards de dinars à titre de dédommagement.

L’ex-Premier ministre Ahmed Ouyahia, les anciens ministres de l’Industrie Abdessalem Bouchouareb, en état de fuite, Bedda Mahjoub et Youcef Yousfi ainsi que Amine Tira, cadre au ministère de l’Industrie, doivent verser à l’opérateur économique Abdelhamid Achaïbou, propriétaire de KIA, deux milliards de dinars à titre de dédommagement aussi. Devant le tribunal, Abdelhamid Achaïbou, qui s’est constitué partie civile, a expliqué comment Abdesselam Bouchouareb a bloqué en 2016 ses projets de montage de véhicules en privilégiant d’autres concessionnaires. Cela lui a valu beaucoup de pertes et l’a obligé à licencier plus de 1000 salariés. Le juge a également ordonné l’indemnisation à hauteur de 200 millions de dinars de Abderrahmane Achaïbou, frère de Abdelamid, pour le blocage de ses projets dans l’automobile.

Le turc Emin Auto sera dédommagé

Le tribunal de Sidi M’Hamed a également ordonné Ahmed Ouyahia, Abdesselam Bouchouareb, Mahdjoub Bedda et Youcef Yousfi de verser 500 millions de dinars d’indemnisation au turc Emin Auto. Nihat Sahsuvaroglu, PDG d’Emin Auto, a, lors de son audition au procès, accusé ouvertement Ahmed Ouyahia d’avoir bloqué son dossier après que le comité technique du ministère de l’Industrie ait donné son avis favorable. 

L’industriel turc dit avoir dépensé 60 millions de dollars pour son projet en Algérie. « Mais, là, à cause de ces freins, je suis au bord de la faillite », a confié Nihat Sahsuvaroglu. Le tribunal de Sidi M’Hamed a, dans le même procès, ordonné à Ouyahia, Bouchouareb, Yousfi, Bedda et Amine Tira de verser 100 millions de dinars au groupe Cevital. Omar Rebrab, fils du patron de Cevital, Issad Rebrab, et représentant de Hyundai et de Fiat, a déclaré, interrogé par le juge, que le groupe a été exclu des projets de montage de véhicules au profit d’Hassan Arbaoui, de Mahieddine Tahkout et de Tiziri Motor. Une exclusion politique liée à la position de Issad Rebrab par rapport à l’ex-président Abdelaziz Bouteflika.

Les sociétés d’Arbaoui, de Mazouz et de Bairi condamnées à payer des amendes

Autre décision du tribunal de Sidi M’Hamed : les sociétés d’Hassan Araboui ont été condamnées, pour chacune d’elle, à payer une amende d’un million de dinars à cause de la confirmation du délit de « bénéfice du pouvoir et de l’influence des agents de l’Etat ».

Chaque société d’Ahmed Mazouz doit également verser une amende d’un million de dinars pour « blanchiment d’argent » et pour  « dissimulation de l’origine illicite de fonds». Idem pour les sociétés de Mohamed Bairi tenues de payer une amende d’un million de dinars. Condamné pour « blanchiment d’argent », « dilapidation volontaire de deniers publics », « octroi d’indus avantages, « fausse déclaration » et « abus de fonction »,  Ahmed Ouyahia, l’ex-Premier ministre, doit payer une amende de deux millions de dinars, après avoir été condamné à 15 ans de prison.

Le juge a décidé de confisquer tous les biens saisis d’Ouyahia, l’obligeant de restituer « le profit illicite », même détenu par les membres de sa famille ou des parents par alliance. Il s’agit particulièrement des 30 milliards de centimes, trouvés dans un compte BDL, qu’Ouyahia n’a pas pu justifier devant le tribunal.

Ouyahia privé de ses droits politiques

Il a déclaré que ces fonds n’avaient pas de lien avec ses activités gouvernementales. Il n’a pas pu également expliquer le transfert d’argent vers le compte de son épouse.

Le juge a également décidé de priver Ahmed Ouyahia de ses droits civils et politiques. Une première dans l’Histoire de la justice algérienne. Condamné à 12 ans de prison pour notamment « octroi d’indus avantages lors de la passation de marchés » et « participation au financement de la campagne électorale de l’ex-président Bouteflika », Abdelmalek Sellal doit payer une amende d’un million de dinars et restituer le « profit illicite » même s’il se trouve chez ses enfants ou ses parents par alliance.

Le montant de ce profit illicite n’a pas été précisé dans la sentence.  Condamnés à 10 ans de prison, Youcef Yousfi et Bedda Mahdjoub, anciens ministres de l’Industrie, doivent payer, chacun, une amende de 500.000 dinars pour, entre autres, « dilapidation volontaire de deniers publics ». 200.000 dinars d’amende pour Nouria Yamina Zerhouni, ex-wali de Boumerdes, avec une peine privative de liberté de 5 ans pour délit « d’abus de fonction ».

« Financement occulte » de la campagne de Bouteflika

Ali Haddad, patron du groupe ETRHB, a été condamné à 7 ans de prison avec une amende de 500.000 dinars pour «participation au blanchiment d’argent » et « financement occulte de la campagne électoral » de Bouteflika, campagne inachevée après l’abandon du projet du 5ème mandat en mars 2019. Dans la même affaire, Abdelghani Zâalane, qui a remplacé pendant quelques jours Abdelmalek Sellal, à la tête de la direction de campagne, a été acquitté. A son arrivée, des sommes d’argent étaient déjà déposées dans deux comptes bancaires au nom de Sellal. L’ex-Premier ministre a déclaré que les fonds étaient gérés directement par Said Bouteflika.

Le tribunal a convoqué le frère de l’ex-président qui a refusé de répondre aux questions du juge. Said Bouteflika n’a pas été condamné. Par contre, trois fonctionnaires du groupe ETRHB, qui ont joué le rôle d’intermédiaires à la demande de leur patron, ont été condamnés à deux ans prison dont un avec sursis. Chaib Hamoud, qui était en charge des finances de la campagne de Bouteflika, Aourane Ahmed et Malek Hadj Said doivent également verser, chacun, 200.000 dinars d’amendes. Le tribunal a décidé de la confiscation des fonds saisis de la campagne de Bouteflika.

Confiscation des fonds de Mazouz et de Arbaoui

Les fonds de l’homme d’affaire Ahmed Mazouz seront confisqués. Il a été reconnu coupable « d’incitation d’agents publics en vue d’obtenir un indu privilège », de « blanchiment d’argent » et de « financement des partis politiques ». Il a écopé d’une peine de 7 ans de prison et d’une amende d’un million de dinars. 6 ans de prison et une amende d’un million de dinars pour Hassan Arbaoui, autre homme d’affaires, pour « bénéfice de l’autorité des agents de l’Etat en vue de la conclusion de marchés publics » et « blanchiment d’argent ». Les fonds saisis d’Hassan Arbaoui seront également confisqués. Mohamed Bairi, homme d’affaires, a été condamné à trois ans de prison assortie d’une amende de 200.000 dinars, sans confiscation de ses fonds. Même peine pour Farès Sellal, fils d’Abdelmalek Sellal, pour « participation à incitation d’agents publics à conclure les marchés publics ». Fares Sellal était partenaire dans une société d’Ahmed Mazouz avec une part de 23 %, introduit sans contrepartie. Il a quitté la société avec une indemnité de 9 milliards de centimes.