Procès d’Alger : le procureur de la République accuse Ouyahia, Sellal et Yousfi d’avoir dilapidé 13.000 milliards de centimes - Radio M

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Procès d’Alger : le procureur de la République accuse Ouyahia, Sellal et Yousfi d’avoir dilapidé 13.000 milliards de centimes

Ghada Hamrouche | 08/12/19 13:12

Procès d’Alger : le procureur de la République accuse Ouyahia, Sellal et Yousfi d’avoir dilapidé 13.000 milliards de centimes

Le procureur de la République a accusé, dans le procès sur les unités de montage de véhicules et sur « le financement occulte » de la campagne électorale de Bouteflika, Ahmed Ouyahia, Abdelmalek Sellal et Youcef Yousfi d’avoir dilapidé 13.000 milliards de centimes en accordant des avantages indus à des opérateurs économiques. « Le trésor public a perdu 7700 milliards de centimes en raison des agissements d’Ahmed Ouyahia, en tant que Premier ministre. Il a accordé d’indus avantages à l’homme d’affaire Ahmed Mazouz à la faveur de la liste des 5 + 5. Il a exclu d’autres opérateurs comme Abdelhamid Achaïbou, Omar Rebrab et Emin Auto », a déclaré le procureur dans son réquisitoire, ce dimanche 8 décembre 2019, au tribunal de Sidi M’Hamed, à Alger. La liste 5+5 comprenait les opérateurs autorisés à créer des unités de montage de véhicules en Algérie (5 lourds + 5 légers).  « Ahmed Ouyahia possède un compte de 30 milliards de centime. Il n’a pas pu justifier l’origine de ces fonds au tribunal. Ces fonds, non soumis au système fiscal, proviennent de blanchiment d’argent », a-t-il ajouté.

Une villa de 60 milliards de centimes pour Abdesselam Bouchouareb

Selon le représentant du ministère public, Abdelmalek Sellal a, de son côté, dilapidé 2400 milliards centimes en raison des avantages accordés aux hommes d’affaires Mourad Oulmi (Sovac) et Mahieddine Tahkout (Cima Motors). « Il a instruit le ministre Bouchouareb pour préparer des cahiers de charges sur mesure aux hommes d’affaires concernés. Sellal a usé d’abus de pouvoir pour obliger les agents de l’Etat à accorder un lot de terrain à l’homme d’affaire Mohamed Bairi à Boumerdes. Il y a également un conflit d’intérêt puisque son fils, Fares Sellal, était devenu partenaire de l’homme d’affaire Ahmed Mazouz (23 %), sans aucune contrepartie financière, trois mois après son arrivée au Premier ministère », a expliqué le procureurIl a accusé Fares Sellal d’avoir profité du poste de son père pour bénéficier d’avantages.Youcef Yousfi, ex-ministre de l’Industrie, a, selon lui, dilapidé 2900milliards de centimes en accordant des avantages et des décisions d’investir dans le montage véhicule « sans respect des lois et sans la présence de partenaires étrangers ». A propos de Bedda Mahjoub, le procureur a déclaré que cet ancien ministre de l’industrie a fait bénéficier des hommes d’affaires de beaucoup d’avantages injustifiés. Il a cité Mahieddine Tahkout, Mourad Oulmi et Hassan Arbaoui. « Malgré ses réserves sur le dossier de Araboui, il a fini par signer les décisions sans respect de la loi. Les dossiers étaient parfois incomplets », a-t-il dit. Evoquant les faits reprochés à Abdesselam Bouchouareb, ancien ministre de l’industrie, en fuite à l’étranger, le procureur a précisé que le prévenu a retiré « des sommes astronomiques » d’argent et a accepté « un cadeau », «qui est un acte de corruption », de Mourad Oulmi, lequel lui a offert une villa d’une valeur de 60 milliards de centimes à Hydra, à Alger. « Un mandat d’arrêt international a été lancé à l’encontre de Bouchouareb. Il a fait perdre au trésor public 1500 milliards de centimes en accordant des avantages d’une manière illégale », a-t-il noté.

Un crédit de 1000 milliards de centimes à Hassan Arbaoui

Dans son réquisitoire, le procureur a évoqué également Aboud Achour, ex-PDG de la Banque nationale d’Algérie (BNA). « Il a accordé, en violation de la loi, un crédit de 1000 milliards de centimes à Hassan Araboui. Araboui a usé de médiation et de soutien de certains ministres pour avoir la marque Kia », a-t-il indiqué. Ahmed Mazouz et le PDG de son groupe, Abdelkader Nemroud, ont, d’après lui, bénéficié également de beaucoup d’avantages dans le dossier de montage de véhicules.  Il a parlé ensuite, en citant leurs noms, des ex-cadres du ministère de l’Industrie accusés d’avoir accordé des avantages et conclu des transactions en violation de loi. « Cela a coûté au trésor public 11.000 milliards de centimes », a-t-il appuyé. Il s’agit Omar Akadir, Mohamed Alouane, Hassiba Meghraoui, Amine Tira, Abdelkrim Mustapha et Karim Boudjemia.

Bairi impliqué dans l’affaire Kamel El Bouchi

Selon le représentant du ministère public, l’homme d’affaire Mohamed Bairi a versé dans le blanchiment de l’argent provenant des ventes de la cocaïne en relation avec Kamel Chikhi (Kamel El Bouchi). « Il a également bénéficié de beaucoup de privilèges dans le dossier d’assemblage de voiture avec l’appui de ministres », a-t-il souligné. Abordant le dossier du «financement occulte» de la campagne inachevée d’Abdelaziz Bouteflika (pour le 5ème mandat), le procureur a cité les noms des quatre prévenus : Ali Haddad, Ahmed Ourouan, Hamoud Chaid et Malek Hadj Said. «Ils sont impliqués à la demande de Said Bouteflika. Ali Haddad a retiré 19 milliards de centimes de l’argent de la campagne qui a été collecté d’une manière illégale », a soutenu le procureur. Et, il a ajouté : « Les opérateurs économiques ont exploité des hauts cadres de l’Etat.  La politique a été dominée par l’argent sale. Le citoyen ne croit plus à rien. Les prévenus ont fait croire au peuple qu’il faut adopter une politique d’austérité pour s’accaparer de l’argent du peuple. Le dossier du montage de véhicules était un projet de destruction du pays. Il n’y a eu ni montage ni industrie automobile. Pire, le citoyen ne peut plus acheter une voiture en raison de la hausse des prix et du monopole consacré par de hauts responsables en faveur d’hommes d’affaires qui ont bénéficié d’avantages et d’exonérations fiscales ».

20 ans de prison ferme requis contre Sellal, Ouyahia et Bouchouareb

Le procureur a requis plusieurs amendes de 1 million de dinars et plus ainsi que la saisie de tous les biens mal acquis des prévenus avec « restitution de ce qui a été détourné ». Il a également requis :  20 ans de prison ferme à l’encontre des anciens Premiers ministres Ahmed Ouyahia,  Abdelmalek Sellal et d’Abdeslam Bouchouareb, 15 ans pour les anciens ministres Youcef Yousfi et Mahdjoub Bedda, 10 ans pour les hommes d’affaires Hassan Arbaoui, Mohamed Bairi, Ali Haddad et Ahmed Mazouz, ainsi qu’Abdelkader Nemroud, Achour Aboud et Nouria Zerhouni (ex-wali de Boumerdes), 8 ans pour Fares Sellal, Omar Akadir, Mohamed Alouane, Hassiba Meghraoui, Amine Tira, Abdelkrim Mustapha et Karim Boudjemia ainsi que les frères Samai (Karim, Sofiane et Mustapha).  Le procureur a requis 8 ans de prison ferme pour l’ex directeur des finances de la campagne de Bouteflika Hamoud Chaid (ex-sénateur), 10 ans pour Abdelghani Zaalane, qui a remplacé Abdelmalek Sellal dans la direction de cette campagne en mars 2019, et Malek Hadj Said, responsable du cabinet au groupe ETRHB de Ali Haddad. Le procès, ouvert mercredi 4 décembre, s’est poursuivi avec les plaidoiries des avocats, certains sont revenus sur leur décision de boycotter les audiences. Les délibérations du  tribunal débuteront après les plaidoiries de la défense.