Procès d’Alger : Abdelmalek Sellal exige la présence de l’ex-président Bouteflika comme témoin - Radio M

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Procès d’Alger : Abdelmalek Sellal exige la présence de l’ex-président Bouteflika comme témoin

Ghada Hamrouche | 02/03/20 10:03

Procès d’Alger : Abdelmalek Sellal exige la présence de l’ex-président Bouteflika comme témoin

Reporté à deux reprises, le procès en appel sur l’affaire du montage de véhicules et du financement occulte de la campagne électorale inachevée de Bouteflika pour un 5ème mandat, en 2019, a repris, ce dimanche 1 mars, au niveau de la Cour d’Alger. Au box des accusés : les deux anciens Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, les anciens ministres Abdelghani Zaâlani, Abdesselam Bouchouareb (en fuite), Youcef Yousfi et Mahjoub Bedda, l’ancienne wali Nouria Zerhouni, les hommes d’affaire Hassan Larbaoui, Ahmed Mazouz, Mohamed Bairi, Ali Haddad. En tout, une trentaine d’accusés. Le 10 décembre 2019, Ouyahia a écopé d’une peine de 15 ans de prison, 12 ans pour Sellal, 10 ans pour les Yousfi et Bedda. Jugé par contumace, Bouchouareb a été condamné à 20 ans de réclusion. Des peines allant de 3 à 7 ans ont été prononcés à l’encontre des hommes d’affaires Bairi, Larbaoui, Mazouz et Ali Haddad. Ce dimanche 1 mars, les avocats ont évoqué l’incompétence de la Cour en rappelant l’article 177 de la Constitution relatif à la création de la Haute Cour de l’Etat. Cette juridiction, habilitée à juger le président de la République et les Premiers ministres, n’a pas été créée. Lors des auditions, Ahmed Ouyahia a rejeté les accusations relatives « à l’octroi d’indus avantages » à des hommes d’affaires pour les unités de montages de véhicules.

Ouyahia : « Le projet des unités de montages en Algérie a été attaqué de l’étranger… »

Il a déclaré qu’il a été à quatre reprises chargé de diriger le gouvernement et que son but était de « relancer l’investissement » en Algérie. « Je n’étais pas gestionnaire, j’étais chargé d’appliquer le programme du gouvernement voté par le Parlement », a-t-il déclaré. Selon lui, le projet de lancer des unités d’assemblage de véhicules en Algérie a été attaqué de l’étranger « pour ne pas freiner les importations ». Il a reconnu avoir limité les listes des opérateurs qui peuvent intervenir dans l’automobile pour « que le secteur ne devienne pas comme celui des minoteries ». Le juge s’est interrogé sur le non agrément des concessionnaires qui ont obtenu des autorisations d’ouvrir des unités de montage de véhicules, sur le non-respect de la condition d’avoir un partenaire étranger et sur l’obtention illégale d’exemptions de droit de douane. « Il faut demander des comptes au ministère des Finance qui n’a pas préparé les textes d’application de la loi de finance de 2017 », a répondu Ouyahia. Selon lui, toutes les transactions ont été conclues en présence de onze ministres de son gouvernement. Il a expliqué que l’élargissement de la liste des concessionnaires autorisés à exercer une activité de montage en Algérie, passée de 10 à 40 en février 2018, était lié au nombre de demandes et des recours déposés au niveau de la Présidence de la République. Il a précisé que le dossier KIA a été « traité » avant son arrivée à la Primature.

Sellal : « j’ai été désigné par téléphone… »

A propos de l’argent trouvé dans son compte bancaire, Ouyahia a nié qu’il soit « le produit » de pots-de-vin. « Est-il raisonnable de déposer de l’argent de la corruption dans le compte d’une banque publique ? Si j’avais de l’argent à cacher, je ne le mettrai pas là », a-t-il répondu. Auditionné, Abdelmalek Sellal a, de son côté, rejeté les accusations portées contre lui et a répété les propos d’Ouyahia sur le Premier ministre « qui exécute » un programme présidentiel « voté par le Parlement ». « Le premier responsable pour l’application de ce programme est le président de la République. Ma mission était d’assurer la coordination entre les ministères. Chaque ministre avait ses prérogatives. J’ai était responsable dans une période difficile. Le président était malade, éloigné de la gestion qui était prise en charge par son frère (Said Bouteflika, ndlr) », a-t-il soutenu. Le juge lui a rappelé la gestion qualifiée de catastrophique du secteur de l’automobile par Abdesselam Bouchouareb. « Je n’ai rien pu faire contre lui (makdertlouch). Ce n’est pas le Premier ministre qui désigne les ministres. J’ai été désigné par téléphone. Quand, je suis arrivé, on m’a remis une liste portant les noms des ministres désignés», a-t-il répondu en ajoutant qu’il envisage de révéler des choses dans ses mémoires.

Sellal : « Bouchouareb me préparait un complot… »

 Concernant les avantages accordés à des hommes d’affaires pour les unités de montage de véhicules, il a précisé que les décisions étaient prises par le Conseil d’investissement et le ministère de l’Industrie. « Je n’ai rien à avoir avec cette affaire. Il faut convoquer cinq gouvernements, pourquoi il n’y a que moi et Ouyahia. Nous avions une seule référence le décret signé par Benbitour et appliqué par Bouchouareb. Quand j’ai vu les dérapages de Bouchouareb, j’ai voulu réagir, mais Allah ghaleb. Bouchouareb me préparait un complot (kan yahferli). Quand l’Etat était à l’abandon, j’ai représenté le président de la République, reçu par Obama. Mais, j’étais un petit ministre qui n’avait pas le droit de signer ! », a confié Sellal. Il a évoqué le cas d’Abdelmadjid Tebboune, sans citer son nom, lorsqu’il a été écarté, en 2017, du Premier ministère, deux mois après sa désignation après avoir osé attaquer les hommes d’affaires proches de Said Bouteflika.  Sellal, qui a critiqué la gestion de l’ex-président de la République, a demandé la convocation d’Abdelaziz Bouteflika en tant que témoin pour l’entendre sur les transactions « parce que cela faisait partie de son programme présidentiel ». Le juge a refusé une question des avocats pour savoir si le président Bouteflika signait les décisions ou pas. A noter enfin que le début du procès a été retardé en raison d’une panne des microphones dans la salle d’audience.