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Premières nominations : les idéologues du complot se sentent blousés (Blog)

Said Djaafer | 01/01/20 07:01

Premières nominations : les idéologues du complot se sentent blousés (Blog)

Avec les premières décisions de nomination aux hautes fonctions prises par Abdelmadjid Tebboune, se sont évaporées les illusions idéologiques sur lesquelles s’appuyait le discours pro-pouvoir depuis qu’il a annoncé que les élections étaient son unique plan. Le Premier ministre choisi est comptabilisé dans le camp de ceux qui ont dirigé le pays dans les années 90. Sa désignation rend caduques toutes les thèses propagées, au moins depuis 2014, selon lesquelles ce sont les résidus des putschistes de 1992 qui s’opposeraient à la prolongation du mandat de Bouteflika; et qu’une guerre féroce se déroulerait pour assainir l’Etat et l’institution militaire de leurs affidés. Durant toute la période du quatrième mandat l’idée dominante propagée était qu’œuvrer à se débarrasser de l’hégémonie française que ces derniers incarneraient était la véritable bataille en cours entre les différentes ailes du pouvoir; ou bien entre l’armée et ce qui a été désigné par “l’Etat profond”, lequel n’a trouvé pour le théoriser que l’ancien SG du FLN, Amar Saadani.

Cette thèse a été l’arme principale dirigée contre la révolution pacifique après qu’elle eut fait tomber Bouteflika. Elle a été reformulée sur une base idéologique, les manifestants étant décrits comme des jouets manipulés par les réseaux dudit Etat profond, les appareils partisans, les milieux de l’argent et les médias qui leur sont liés; et qui, bien entendu, seraient tous liés à la France et défendraient un projet idéologique visant à maintenir l’Algérie otage de l’ancienne puissance coloniale. Même si le discours officiel ne s’est pas avancé jusqu’à adopter de manière franche cette thèse, il a choisi des formules qui le suggère clairement. Les médias du pouvoir, à travers les intervenants sur les plateaux, se sont chargés de faire le lien entre cette thèse et le discours officiel, lequel a été constamment expliqué dans ce sens. Le refus des options du pouvoir était présenté comme étant le fait d’un courant idéologique précis associé, de manière outrancièrement mensongère et manipulatrice, à une seule région du pays. Tel est le message avec lequel les médias pro-pouvoir ont bombardé les Algériens, en boucle durant toutes les heures pendant au moins sept mois.

Ce n’est pas seulement le pouvoir qui s’est chargé de propager cette thèse. Des partis, qui se considèrent comme étant dans l’opposition, l’ont suivi et se sont empressés à appeler à la tenue des élections, comme unique solution en demandant qu’elles soient intègres. Ces partis se sont insérés dans un discours étrange sur la “minorité” et la “majorité”, ils ont abusé des appels à l’alignement idéologique. Ils ont ignoré de ce fait la réalité de la rue qui a confirmé que la révolution pacifique a dépassé ces alignements et ces polarisations. Ces partis n’ont pas accordé d’importance au consensus existant sur l’objectif de changement de régime pour lequel les Algériens sont sortis le 22 février.

Le choix de Tebboune comme président et les nominations qu’il a faites montrent que le régime n’a pas d’idéologie. Son seul ennemi est celui qui exige un changement réel et cherche à l’atteindre de manière organisée et efficace. Aussi, en matière de mise en détention, de mises sous contrôle judiciaire et même de résidence surveillée, aucune distinction n’est faite un islamiste, un militant de gauche et un jeune qui n’a pas fait de politique auparavant, ni entre un poète et un peintre. Tout comme nous trouvons parmi ceux qui ont soutenu le coup d’Etat de 1992 des gens qui soutiennent le pouvoir et d’autres qui s’opposent à lui.

Cette diversité, nous la retrouvons également dans les rangs de ceux qui se sont opposés à la feuille de route du pouvoir et qui continuent, aujourd’hui, de manifester. Quant au pouvoir, il est tel qu’il fut, sans changement, prêt à accepter les soutiens de n’importe quelle partie , sans le moindre embarras à les utiliser toutes pour continuer avec les mêmes méthodes qu’il utilise pour dominer la société.

Le régime entame 2020 sans la moindre légitimité, la biologie s’est chargée de la légitimité révolutionnaire et en a fait une relique du passé; sa panique face à la révolution pacifique l’a poussée vers le plus mauvais choix, celui du passage en force à travers l’imposition d’une élection qui a accentué la crise de légitimité à laquelle il tente de remédier par un dialogue pour lequel il ne trouve pas d’interlocuteurs.

Les partisans des élections parmi les idéologues entament l’année avec un sentiment de déception et d’amertume en découvrant qu’ils pourchassaient des mirages. Tout cela fait partie des réalisations de la révolution pacifique qui a convaincu de nombreux Algériens que ce régime n’a ni projet, ni idée et qu’il ne défend ni des principes, ni des valeurs; et que le danger qu’il représente pour l’Algérie doit les pousser à unifier leurs rangs et à aller de l’avant pour arracher la liberté et engager le processus de construction de l’Etat de droit.

Traduit par la rédaction – Article original