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Premier roman, premiers émois…

Radio M | 20/08/22 16:08

Premier roman, premiers émois…

Le choix du premier roman a cette vertu que le lecteur échappe encore à l’influence tentaculaire -et souvent coordonnée-  des médias. Qu’il se retrouve seul ou presque à décider de son choix. Et qu’il est seul maître de son jugement. C’est à la fois une fraîcheur, et un privilège. Dans presque tous les cas, cela ne peut que faire plaisir à l’auteur…

Une chose est sûre, le premier roman reste inoubliable. Pour son auteur, au moins. On se souvient de tout. De l’accord de l’éditeur : la joie est ineffable. De la présentation aux commerciaux : le trac, insupportable. Et, enfin, de la découverte  de l’objet fini : le regard, ébloui mais fier. Il va sans dire que dans ce petit objet qui vient d’être enfanté, ce premier né pour ainsi dire, il y a des mois ou des années de travail, des rêves à la teneur enfantine, des espoirs tour à tour timides et exubérants.

Et puis cette réalité implacable, incontournable : l’ouvrage aura-t-il du succès ? Et s’il y a une suite, comment sera-t-elle ? Toujours est-il que, triomphant(e) ou déconvenu(e), vous voilà entré(e) dans le monde mythique des rayonnages des bibliothèques.

Et qu’importe la «surproduction» romanesque. Qu’importe la banalisation de l’écriture. Qu’importe les coups-bas éditoriaux. La publication, la première surtout, a quelque chose d’un sacre. Rien ne sera plus jamais comme avant.

Pour l’éditeur, évidemment, les choses sont un peu différentes. Des romanciers, il en a vu passer : des débutants, des chevronnés…

Ce premier roman qu’il publie est un acte de foi. Dans l’auteur d’abord. Dans le lecteur ensuite. Un risque aussi. Au vu des chiffres de ventes des romans et autres genres littéraires, il a statistiquement plus à perdre qu’à gagner. Alors, pourquoi s’être investi dans ce premier roman? Parce que la découverte reste sans doute la partie la plus excitante d’un métier très particulier, qui peut se pratiquer comme l’engagement d’une vie et / ou un pur commerce.

Pour l’éditeur, son auteur ne fera sans doute pas un succès. Mais, s’il ne s’est pas trompé, il fera un écrivain. A défaut d’y gagner de l’argent -on a vu pourtant, et plus d’une fois, la faveur du public se porter sur un premier livre-, l’un comme l’autre y trouveront de l’estime.

Cela nous amène à cette assertion o combien lourde de sens : l’économie du livre a ceci d’archaïque que tout le monde n’y travaille pas pour faire fortune. Pour le lecteur enfin, lire -et faire lire- un premier roman, c’est partager l’un des aspects les plus exaltants de l’expérience littéraire. Celui de la découverte. Or comme toute découverte, elle comprend des risques. On peut être déçu. Mais on a vu des risques plus grands.    

Kamel Bouslama