Le Prix Ali Bey Boudoukha destiné à récompenser les meilleurs articles d’investigation en Algérie, a été attribué ce 21 décembre, au journaliste indépendant Lyas Hallas pour l’ensemble de ses enquêtes. Le lauréat a essentiellement réalisé des “enquêtes économiques”, qui traitent de la corruption, la fraude, l’évasion fiscales …etc.
L’entreprise médiatique Interface Médias, qui édite les deux sites d’informations en ligne “Radio M Post” et “Maghreb Émergent” ainsi que le web radio “Radio M”, a institué ce Prix de l’investigation en 2013, en mémoire du défunt journaliste Ali Bey Boudoukha membré fondateur de l’entreprise interface Médias.
“Ali Bey Boudoukha avait un souci très méticuleux de la précision de l’information et il pouvait passer des heures à téléphoner et se déplacer pour aller vers des sources diverses afin de la recouper et de la vérifier. Pour lui, le premier devoir du journaliste est de déjouer les manipulations en prenant le temps de vérifier et de recouper. Ce qui est la base de l’enquête journalistique”, se souvient le journaliste Said Djaffer de son ami et confrère Ali Bey Boudoukha.
Lors de la première édition de ce concours, le jury avait attribué trois prix d’encouragement aux journalistes Meziane Abane et Hacen Ouali d’El Watan Week-End et Mohamed Koursi d’El moudjahid. La deuxième édition en 2017 a récompensé le journaliste indépendant Tarik Hafid pour son enquête intitulée “Industrie de phosphate – un engagement de 15 milliards de dollars avec une entreprise fantôme”, publié au Soir d’Algérie.
Lyas Hallas est le lauréat de cette troisième édition du Prix Ali Bey Boudoukha. Il a commencé sa carrière en 2006 au Soir d’Algérie. Il a ensuite travaillé au quotidien Liberté et le site électronique Maghreb Émergent. Depuis février 2019 il est journaliste indépendant. Lyas Hallas publie ses enquêtes sur des médias locaux mais aussi des médias étrangers notamment le Monde, Mediapart, et le journal libanais en langue arabe Daradj.
Lyas Hallas, est l’auteur de plusieurs enquêtes sur les swisses Leaks et les Panama Papers. Sur ces dernières il dira que ce sont celles qui ont eu le plus d’impact.
“L’enquête n’est pas un genre en soi mais une vocation. C’est un travail de longue haleine. Il faut être passionné pour réussir. Quand on réalise des enquêtes économiques, on trouve 90% de l’information dans des sources ouverts. Beaucoup d’entreprises cotées en bourse sont obligées de publier des rapports où on peut trouver des informations, il y a également des appels d’offres qui contiennent des éléments d’informations. Il suffit de savoir donner du sens à ces éléments éparpillés”, précise le journaliste.
Lyas Halas explique le manque d’enquête dans la presse algérienne par “une évolution négative de la presse algérienne”. Celle-ci a, selon lui, “abandonné son rôle d’informer pour devenir une presse militante”.
“Le métier offre une panoplie de genres journalistiques qui permettent au journaliste et au média à la fois d’informer et d’exprimer une opinion. Mais ce qui dangereux est ce mélange des genres”, souligne Lyas Hallas.
Ce journaliste est également membre du consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ). Sur cette expérience de l’enquête en réseau, Lyas Hallas dira que c’est un échange cordial de bons procédés qui permet un gain de temps. Des conditions qui ne sont pas nécessairement réunies dans les médias algériens”.
Lyas Hallas se souvient avoir rencontré Ali Bey Boudoukha en 2011. Il l’avait interviewé lors de la journée mondiale de la liberté de la presse pour RFI. Au micro de ce grand journaliste, Lyas Hallas confiait à l’époque “La presse a besoin d’une réorganisation. D’abord il faut établir une commission de carte pour dire qui est journaliste ou qui ne l’est pas. Pour l’instant, c’est l’anarchie totale. Il faut aussi créer un office du suivi de la diffusion qui nous dise qui sont les titres porteurs donnant plus de visibilité aux annonceurs ».
