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Europe, Russie, Turquie: ces puissances qui “interfèrent” en Libye et appellent au cessez-le-feu

Said Djaafer | 09/01/20 09:01

Europe, Russie, Turquie: ces puissances qui “interfèrent” en Libye et appellent au cessez-le-feu

En Libye, toutes les puissances qui interfèrent sur le terrain pour attiser les confrontations font assaut d’appels publics à la fin des affrontements. L’Union européenne mardi, la Russie et la Turquie mercredi, ont ainsi appelé à un cessez-le-feu en Libye. Mais le scepticisme est de mise, ces Etats dénonçant surtout les “interférences” des autres et occultent les leurs. 

La liste des pays qui interfèrent dans le désastre libyen est longue: Emirats, Arabie saoudite, Égypte, Russie, France, Italie, Turquie… Les appels publics au cessez-le-feu ne risquent pas de changer la donne sur le terrain où les protagonistes locaux cherchent à améliorer leur position en attendant la tenue de la Conférence de Berlin à laquelle a appelé l’Allemagne. Quant aux puissances étrangères impliquées, elles font des déclarations destinées justement à masquer leur ingérence ou juste à dénoncer celle des autres. L’apparence d’activisme diplomatique sur le dossier libyen est en tout cas directement provoquée par l’engagement turc auprès du gouvernement de Sarraj.

L’UE dénonce la “persistance des ingérences extérieures”

 Le 7 janvier, une déclaration conjointe entre le Haut représentant de l’Union européenne pour la politique étrangère et de sécurité commune et des ministres des affaires étrangères de l’Allemagne, de la France, de l’Italie et du Royaume-Uni ont appelé à “un cessez-le-feu” et  “à cesser l’escalade et l’ingérence étrangère”. 

“L’UE est fermement convaincue qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise libyenne (…) Une cessation immédiate des hostilités est donc cruciale” indique la déclaration de l’UE qui appelle à “ respecter et faire appliquer strictement l’embargo des Nations unies sur les armes”. 

La déclaration européenne affirme que la “persistance des ingérences extérieures alimente la crise” en ajoutant que plus “ les parties libyennes belligérantes s’appuient sur une aide militaire étrangère, plus elles accordent à des acteurs extérieurs une influence exagérée sur les décisions que la Libye devrait prendre souverainement, au détriment des intérêts nationaux libyens et de la stabilité régionale.”

La déclaration est plus clairement dirigée contre la Turquie, qui a décidé d’envoyer des troupes pour soutenir le Gouvernement d’union nationale reconnu par la communauté internationale basé à Tripoli que les forces de général Khalifa Haftar tente de prendre par la force.  Pourtant, l’un des signataires de la déclaration au moins, la France, interfère dans le dossier libyen en apportant un soutien au général Haftar dont l’offensive sur Tripoli a donné le coup de grâce au processus politique laborieusement mené par l’émissaire spécial des Nations unies, Ghassan Salamé.

Poutine et Erdogan appellent au cessez-le feu

Hier, c’était au tour de deux autres “interférents” en Libye, la Russie et la Turquie d’appeler à un cessez-le-feu. La Turquie a déployé des militaires en Libye à la suite d’un accord avec le gouvernement de Fayez al-Sarraj, la Russie, elle, interfère directement, à travers des mercenaires russes venus prêter main forte aux forces de Haftar qui piétinent aux abords de la capitale libyenne. 

A l’issue d’une rencontre à Istanbul à l’occasion de l’inauguration d’un gazoduc qui consacre  le rapprochement entre leurs deux pays, MM. Erdogan et Poutine ont appelé “tous les belligérants en Libye à cesser les hostilités à 00H00 le 12 janvier”. Dans une déclaration conjointe, Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan assurent que la  stabilité en Libye ne peut être instaurée qu’à travers un dialogue inter-libyen inclusif sous l’égide de l’Onu.

“Un cessez-le-feu immédiat est une condition sine qua non du lancement d’un processus politique interlibyen inclusif sous l’égide de Nations unies qui repose sur l’accord politique de 2015, la résolution 2259 du Conseil de sécurité de l’Onu et autres résolutions appropriées des Nations unies”, souligne la déclaration russo-turque.  L’Algérie qui a été officiellement invitée à participer à la conférence de Berlin sur la Libye fera-t-elle valoir que tout ceux qui dénoncent les ingérences étrangères devraient commencer par cesser d’intervenir?

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