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Comment (re) mettre en valeur le patrimoine historique algérien 

Radio M | 16/07/22 19:07

Comment (re) mettre en valeur le patrimoine historique algérien 

Comment donner un sens plus vaste à la mise en valeur d’un patrimoine historique dont, hélas, on ne reconnait pas toujours l’importance ? Tout bonnement en opérant une (re)valorisation effective du caractère multifonctionnel de ce patrimoine ; et, eu égard aux fonctions et aux interventions futures, un recadrage idoine de cette (re)valorisation à l’échelle humaine.

Partant de ce principe et contrairement à ce qu’on a pu penser, le patrimoine historique dans notre pays ne se réduit pas à une seule valeur, en l’occurrence esthétique. Du fait même qu’on a été confronté à l’épreuve du terrain, on a pu dénombrer non pas une seule, mais une multitude de valeurs propres à ce patrimoine, ou combinées entre elles : valeurs esthétique, monumentale, scientifique, évocatrice, pédagogique, de consistance (physique), ludique et même économique…

Pour ce qui est, par exemple, de la valeur évocatrice, c’est une valeur complexe et sans doute parmi les plus difficiles à définir, car renvoyant généralement à des lieux où l’on ne retrouve guère de traces physiques : lieux de batailles antiques, historiques et  même plus proches de nous temporellement. Ici le patrimoine -ou l’élément de patrimoine- tiendra sa valeur de ce qu’il nous rappelle surtout l’histoire du monde physique auquel il se rapporte.

L’autre valeur combinée est la valeur esthétique. L’élément de patrimoine peut alors devenir une œuvre d’art historiée en ce qu’il met en exergue la relation entre le mouvement, l’objet et le paysage. Les ruines romaines font, à cet égard, l’objet d’une appréciation esthétique du patrimoine historique.

Valeurs ludique et économique ne le cèdent pourtant pas aux deux premières citées. Elles font au contraire priorité à l’essentiel, à savoir les fonctions humaines et sociales : visites et animations touristique et culturelle, ressources à utiliser pour le développement d’une ville, d’un village ou d’un territoire…

L’Algérie s’ouvre aux regards, mais cela signifie aussi que ce magnifique pays doit être préservé

Bien sûr, les principaux problèmes rencontrés demeurent ceux de la connaissance de l’objet ou des divers éléments composant le patrimoine historique aux fins de restauration et de protection de ces éléments. Celui, également, de la révélation de l’objet considéré -ou des éléments- et du système environnant. Ici l’intervention de valorisation se ferait plutôt dans le sens de l’explicitation de ce système, des modes et intensités d’usage, etc.

L’exemple du parc archéologique intégré est, à ce titre, significatif de ce qu’il peut être utilisé comme ressource économique. A titre pédagogique aussi. D’autres exemples peuvent être tout autant valables et sont, du reste, largement usités de par le monde : ceux du parc-système -à l’image de la ville romaine (Timgad, Djemila, Tipasa, etc.), la ville préromaine et la ville actuelle- et parc-itinéraire, tel le parc rupestre (Hoggar, Tassili N’Ajjer) dans un milieu désertique.

Bien entendu il y a des risques à considérer dans ces divers types d’intervention : risque de banalisation, de sur utilisation, d’excès de commercialisation ou tout simplement de surestimation économique en ce qu’il y a d’excès de confiance dans la valeur économique d’un patrimoine historique donné. D’où, conséquence directe, l’identification d’un risque autrement plus grave : celui de la rupture des ressources d’équilibre.

Comme l’a si bien écrit l’historien Benjamin Stora, «la beauté montrée comme sauvegarde possible de paysages n’a pas un sens nostalgique ; on y perçoit aussi les nouveaux chocs causés par une agriculture intensive, les déchets urbains, les constructions du bord de mer et la lente avancée du désert. L’Algérie s’ouvre aux regards, mais cela signifie aussi que ce magnifique pays doit être préservé».

Kamel Bouslama